• 69

    Paris,

    Dimanche 20 mars 2016

     

     

    Monsieur mon mari,

     

    Me voilà à ma dernière soirée chez "nous" sans toi. Je n'ai pas compris pourquoi tu as voulu mon séjour à Paris en raison du salon du livres dans ton absente après m'avoir affirmé ta présence par écrit, mais je ne t'en veux pas. Dire que je n'en suis pas déçue serait mentir, surtout que pas une seconde je n'avais cru possible que tu ne sois pas là.

     

    Rien ne s'est déroulé comme je le désirais. Ton absence, le salon du livre qui n'est pas un bonheur mais une foule bruyante  et la mise en eau.

     

    Chez moi je n'ai jamais songé  mettre en eau l'aquarium d'ici. Non jamais. J'ai mille fois tourné dans ma tête son gigantisme, ton geste démesuré. Je me disais : ok c'est Welch qui finance donc pour Cole c'est gratuit mais tout de même, pourquoi s'être infligé les travaux, pourquoi avoir réduit de moitié le dressing d'entrée, pourquoi avoir toucher au miroir ? C'est comme si je ne parvenais pas à dépasser le stade 1. Admettre avoir avant d'intégrer à la vie.

     

    Non jamais je ne m'étais demandée comment vivre, travailler, en Bretagne avec mes poissons sur Paris. Et pour cause. C'est impossible. Quand je pense Paris, je pense à toi. Oui il m'arrive souvent, très souvent de me demander comment nous pourrions avoir une relation alors que nous sommes si long tout le temps. Là aussi il y a de l'impossibilité dans l'air - Triste drame. Mais si je suis prête à couvrir beaucoup de km pour toi, pour des poissons .... Il y a de quoi rire. Toi tu es autonome, tu sais très bien te passer de moi (trop d'ailleurs) mais eux, ils ont besoin de moi chaque jour. Je ne peux pas vivre en un autre lieu qu'eux, donc mes poissons ne pourront jamais plonger dans le grand bain.

     

    Si tu as des idées je suis preneuse. Que peut-on faire de tout cet espace en eau ? On ne va tout de même pas vider l'aquarium.

    On est au pied d'une grosse galère. Ok moi pas toi. C'est moi qui n'est pas retenu Cortier.

     

     

    Si je me suis assise ce jour, ce n'est pas pour revenir sur le sujet de l'aquarium. Ce qui est fait est fait et je vais devoir assumer.

     

    Non Cole, avant de partir à 18h ce soir, je veux que tu saches tout. Plus de secret entre nous.

     

    Vois-tu Colerige Alesh, quand tu m'écrivais que j'étais ta femme cela pouvait faire prétentieux, sûr de toi, machiste aussi, en tout cas cela ne reflétait pas une réalité concrète. J'étais ta femme comme je suis ta sirène, c'est une image, une sorte de compliment.

     

    Quand je l'ai entendu dans la bouche de ta concierge, là j'ai pensé que c'était autant pour lui clouer le bec que pour l'obliger à garder une distance vis à vis de moi. Idem pour ce monsieur Cortier. Tu n'allais pas lui dire "je veux que vous fassiez un aquarium de 3000L pour une femme que je n'ai vu qu'une fois, avec qui je corresponds depuis moins d'un an. Idem pour te facilité la vie et renforcer mon image, tu me disais ta femme.  C'était joli à entendre et facile à comprendre.

     

    Mais quand tu as pris mon visage dans tes mains, que tu m'as dit les yeux dans les yeux "parce que tu es ma femme" là c'est bien autre chose. Comme je te l'ai noté sur les feuilles qui t'attendent sur la table de la cuisine, et que tu as du lire si tu es arrivé à celle là,  je l'ai reçu style "mets toi dans le crâne que tu es ma femme" . Mais j'ai peut-être tord en fin de compte. D'avoir parler à Cortier m'a fait ouvrir une porte dans ma réflexion. Tu lui as donné un meuble inutile de grande valeur. Tu aurais pu le vendre et garder l'argent pour toi, mais non. Tu lui as donné le meuble parce qu'il avait besoin de la place pour un aquarium qui ne t'intéresse pas du tout.

     

     

    Tu m'as dit que tu es toujours franc, maintenant, à cause de l'histoire du meuble,  je te crois surtout très pur, et donc je ne peux plus croire que tu veuilles que je me mets dans le crâne que je suis à toi, je crois à l'inverse maintenant, que ton "parce que tu es ma femme"  peut cacher un "je t'en supplie soit ma femme".

     

    Je sais ma théorie nouvelle ne colle pas avec ta bouche qui refuse mes lèvres, avec ta volonté de garder ton numéro de téléphone et ton adresse mail secret, mais depuis hier je me dis que peut-être tu es comme moi, un pauvre gosse qui supplie qu'on l'adopte et qui n'y croit plus, dans le corps d'un adulte. Tu vas me dire que c'est capillotracté mais aujourd'hui j'y crois. Tu ne m'as pas dit "mets toi dans le crane que tu es ma femme" mais peut-être bien " je t'en supplie soit ma femme".

     

    Et si tu étais comme moi ?

     

    Je suis en apparence encore hors sujet, puisque je veux t'écrire ce que je te cache depuis le premier jour, et à la fois je n'y suis pas. C'est parce que je t'imagine comme moi, que je peux tout  raconter. Non je ne t'ai pas descendu de ton piédestal, non, non, je peux même affirmer sans l'ombre d'un doute, que tu t'élèves encore malgré ton horrible absence, disons que j'ai maintenant un escabeau pour t'y rejoindre. Mon message va pouvoir aller jusqu'à toi sans être dénaturé. 

    J'ai la sensation que ce que je viens d'écrire est incompréhensible. Tant pis. Comme on dit "je me comprends".

     

     

    Le matin où nous nous sommes rencontrés au hameau, Françoise, la femme qui nous logeait nous a demandé où nous projetions d'aller dans la journée.

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Personne n'a prononcé ces mots. Je ne les ai pas pensé. La phrase est venue d'ailleurs. Non je ne suis pas Bernadette Soubirou, ou schizophrène, c'est la première fois que j'entendais une voix. Cette voix je suis la seule à l'avoir entendue.

     

    Quand quelqu'un parle, la voix entre par nos oreilles. Quand on pense la voix est en nous. Là elle était en moi mais pas de moi. Aussi étrange que cela puisse paraitre, je t'avoue que je n'y ai pas vraiment prêté attention. Elle ne m'a pas semblé importante. Elle ne m'a pas fait peur non plus. Disons que je l'ai réceptionnée dans une parfaite indifférence.

     

    Françoise nous a parlé du lac, du chemin entre lui et la cascade sa source.

     

    Dès que je suis descendue de voiture, au parking du lac, j'ai réentendu la voix,  son message.

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Ce qui me semble le plus étrange maintenant, c'est qu'alors,  je ne me sois pas intéressée à sa provenance. Elle était pour moi comme une vérité d’Évangile. Je me répète, mais elle ne m'a pas fait peur comme si vraiment non, elle ne présentait aucun danger.

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Je marchais, elle revenait. Tu vois c'est un peu comme si elle était placée tous les 500m. Au final, très honnêtement je ne peux plus dire si je l'entendais encore entre toutes les fois où je me la répétais pour m'en expliquer le message.

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Pour moi mon mari ne pouvait être que Lionel. Que faisait-il en Savoie ? Pourquoi y pensais-je alors ?

     

    J'étais habitée par une phrase qui m'annonçait une vérité, un peu comme l'aurait fait un panneau de signalisation. En avançant je me la passais en boucle tout en  réfléchissant au pourquoi du retour de Lionel dans ma vie.

     

    Et aussi, pourquoi ce panneau de signalisation ? Je ne suis pas du tout mystique. La religiosité je m'en indiffère depuis toujours. La cantinière ne m'a pas fait faire mon catéchisme. Je n'ai jamais ouvert une bille, un coran. J'ignore tout de la torah. Et voilà que les Dieux m'envoient :

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Ce devait  donc être vital pour moi de ne pas  rater Lionel. Pourquoi ? Très franchement la perspective de le revoir ne m'enchantait pas. Il y avait comme une logique de régression je trouvais. Tu vas rire, ou pas, mais il y avait comme un voile de félicité autour de la voix, de son message, de ce monsieur mon mari présent au bout du chemin, alors que l'idée de revoir Lionel créait en moi un mal être.

    Super division intérieure !

     

    Maxime a bien vu que je n'étais pas avec elle. J'ai inventé avoir mal à la tête mais ce n'est pas vrai, il n'y avait aucune douleur. Je ne me voyais pas lui dire avoir entendu une voix et l'inviter à réfléchir avec moi au pourquoi et au comment. D'ailleurs personne n'est encore au courant. C'est comme la mort de mon frère. Il y a des choses que l'on évite de raconter dans sa biographie.

     

    Et puis le hameau est apparu, puis toi, enfin une silhouette. J'ai tout de suite cru que c'était Lionel. Et je n'ai pas aimé. C'est fou mais tout mon corps s'est fermée, je suis entrée en forme défensive. Plus j'avançais vers lui, plus une agressivité s'éveillait en moi. C'est pour ça que j'ai un peu beaucoup dévié du chemin, que j'ai rasé ton mur, je voulais le voir de très près. Au fond de moi ma raison me disait que cela ne collait pas, que ce ne pouvait pas être Lionel. Lionel ne méritait pas un panneau de signalisation venu des Dieux. Mais qui d'autre alors ?

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Je ne me suis jamais demandé si mon frère mort était vivant quelque part, si l'idée de la vie après la mort, la réincarnation, tout ça avait un fondement crédible. Jamais quand il m'arrivait un gros problème je n'ai pensé que mon frère de là-haut se vengeait. Jamais.

     

    Il y a eu à une époque une série télévisée que j'aimais bien. C'était une femme qui voyait les fantômes et qui les aidait à passer de l'autre côté. J'aimais bien cette série mais jamais, non jamais, je n'ai vu ça comme un truc crédible, c'était pour moi de la science fiction. C'était aussi absurde et plaisant qu'un chat dans un dessin animé qui se fait aplatir comme une crêpe et qui reprend forme ensuite. Crédibilité Zéro mais plaisir garanti.

     

    Je suis couturière. Je pars d'une page blanche, je dessine un petit haut. Je gomme, rature, rajoute, enlève et au final je rend réel mon dessin. Et bien je vois le travail des écrivains, des scénaristes comme celui d'une couturière. Ils partent d'un point, ils rajoutent, enlèvent, additionnent. Tout est possible dans la création.

     

    A l'époque où je suivais la série, pas une fois je ne me suis interrogée sur la véracité des faits. En t'écrivant  il me remonte à la mémoire que Louise une stagiaire passée à l'agence regardait la même série que moi. Je me rappelle maintenant que nous en avions parlé, qu'elle m'assurait que tout y était vrai. C'était tellement inconcevable pour moi que je n'y ai accordé aucune valeur, un peu comme le méga bug qui devait arriver avec l'an 2000.

     

    Je suis banalement terre à terre. Tu nais, tu vis, tu meurs et ton corps se fait manger par les petits vers ou est détruire par le feu. Rien avant , rien après.

     

    Au bout du chemin il y a ton mari.

     

    Cette phrase je l'ai entendu plus de dix fois avant d'arriver à toi. C'est ma vérité. Je ne peux pas l'expliquer mais je peux affirmer sa véracité. Comme je peux affirmer que je t'ai vu, que j'ai été comme aspirée par ton regard et que ce fut comme si à l'intérieur de moi une infinie félicité s'était diffusée. Tu ne m'as pas rendu heureuse, non tu as illuminé je ne sais pas quoi en moi et jamais

    JAMAIS

    jamais plus cette lumière, cette chaleur ne m'a quittée, Cole.

     

    Depuis cet instant une force de toi habite en moi. Il en est ainsi. Ce n'est pas de l'amour de moi pour toi, c'est de l'amour de toi  qui émane de moi pour toi. Un retour à la source.  Un besoin viscéral de retour à la source. Une force viscérale qui me pousse à m'unir à toi. Ma place est contre toi.

     

     

    Peut-être qu'un jour j'oublierai avoir entendu la phrase. Jamais je ne pourrai oublier la sensation que tu m'as fait vivre.

     

    Je suis arrivée à toi (à Lionel) fermée, limite agressive et cette carapace s'est comme soulevée en moi, elle n'a pas fondu, elle s'est soulevée et dissoute en sortant de moi par le haut. Oui je suis devenue libre et légère par les pieds d'abord, enfin la taille, c'est comme si mes jambes n'étaient pas de l'histoire. Ensuite il y a comme eu une rotation oui une rotation. Mon enveloppe corporelle n'a pas bougé d'un millimètre mais en dedans j'ai fait une rotation sans jamais perdre tes yeux.

     

    Je sais que ce que je raconte relève de l'impossible et pourtant ce ne fut rien d'autre.

     

    Ensuite il y a eu comme une fleur qui s'ouvre, et quelle merveille alors. Oh Cole si j'avais pu te renvoyer alors, un centième de la bonté, de l'amour qui s'épanouissait en moi, alors, tu aurais eu le sentiment d'être le plus heureux des hommes.

     

    C'est d'un triste à pleurer mais toujours quand je repense à cette expérience je redoute que tu sois resté froid, comme extérieur à cette magie. Tu donnes sans recevoir. Cela me peine beaucoup.

     

    De retour chez moi je n'ai pas foncé à la bibliothèque pour lire tous les ouvrages sur le paranormal, non, je me fous de la vie des autres, je sais ce que j'ai vécu, je sais que tu es là en moi pour toujours et je sais que les Dieux ou je ne sais qui, m'ont envoyé un panneau de signalisation avant.

     

    Du fond du coeur merci à eux. Si comme Maxime j'étais restée sur le tracé du chemin, nos yeux se seraient cherchés sans parvenir à entrer en contact. Cela aurait été le plus gros drame de ma vie.

     

    Cole j'ignore tout de nos avenirs, mais te savoir sur Terre pour moi est immense.

     

    Ma place est dans tes bras mon amour. Pourquoi tu n'es pas là.

    Dans moins de trois heures je refermerai la porte de l'appartement derrière moi. Dans combien d'heures l'ouvriras-u ensuite ?

     

    Je t'aime Cole. Non ce n'est pas vrai, c'est bien plus que cela.

    Je suis à toi, née de toi, née pour toi.

     

    Cette vérité me fait très peur autant qu'elle me fait sentir la vie.

     


    4 commentaires
  • 68

    Paris

    Samedi 19 Mars 2016.

     

     

    Cole,

     

    J'additionne les feuilles. Quand tu rentreras tu ne pourras pas dire que je n'ai jamais pensé à toi sur le temps du salon du livre qu'il faut maintenant nommer Livres Paris (très con). Comme tu vas le constater, pour n'en perdre aucune, pour qu'elles demeurent classées dans le bon sens (je ne vais tout de même pas les agrafer ou les numéroter) je les ai roulées dans un vase. Tu seras donc accueilli par un bouquet de mots.

     

    Aujourd'hui je me suis intéressée à  mon immense cadeau de noël avant de filer au salon me ruiner un peu plus ou m'enrichir un peu plus, tout dépend comment on voit les choses. J'ai ramené seulement trois livres. Je dois dire que j'avais peur de n'avoir plus le temps d'aller chercher les Anubias et les Microsoriums.

     

    Je ne sais pourquoi j'ai petit déjeuner au salon, assise au sol, face au 4 mètres 28  sur 70 de paradis vide.

     

    Ensuite dans la décante, j'ai trouvé la carte de visite de l'installateur, aussi je lui ai téléphoné. Pourquoi je n'en sais strictement rien. Histoire de parler à un amoureux des poissons ? Peut-être. Pour  pouvoir dire tout haut mon émerveillement ? Franchement je ne sais pas la raison profonde qui m'y a poussait.  Quand il a su qui j'étais il a soupiré un "enfin" qui a été suivi d'un "j'arrive". Je n'ai pas eu le temps de l'en dissuader, il avait déjà raccroché. Moins de 40 minutes plus tard il était là.

     

    Et il a été déçu. Il croyait voir mes bons vieux gros poissons rouges. Oui Monsieur Cortier a été très surpris de ne  même pas le trouver en eau. Mais il a été rassuré de découvrir que tu lui avais dit la vérité, soit que ta femme avait les connaissances de toutes tes ignorances. Il m'a dit que cela avait été ta formule. Il s'en souvient encore car ordinairement les hommes n'aiment pas laisser les grands volumes aux femmes. Quand elles sont meilleures qu'eux, ce qui est souvent le cas (je le cite - il assure que les hommes démissionnent vite face aux problèmes récurrents sans solutions concrètes) elles œuvrent en sous-marin et ils se gardent toujours le prestige. Toi tu l'as contacté en précisant ne rien y connaitre et n'avoir aucune intention d'en savoir plus dans dix ans.

     

    Il a aussi aimé que tu le laisses libre, que tu l'écoutes.

     

    Il m'a expliqué qu'il avait commencé par te faire comprendre au téléphone, qu'un bac d'une contenance de 3000 litres signifiait au bas mot un poids de 5 tonnes. On ne met pas 5 tonnes au quatrième étage, aucun plancher ne peut le supporter et aucun syndic de copropriété ne l'autoriserait, aussi la première démarche était d'oublier le délire et la seconde de faire une étude du plancher menée par des experts pour savoir le poids maximum autorisé pour la sécurité de tous.

     

    Monsieur Cortier en raccrochant le téléphone était certain  de  ne plus jamais avoir de nouvelles de toi et pourtant, tu l'as rappelé avec le résultat d'expertise et l'aval du syndic moins d'une dizaine de jours plus tard.  Il m'a confié qu'alors il avait pensé que tu devais être redoutable en affaires. Pour lui ta devise doit être " Je veux donc j'aurai " .

     

    Ensuite quand il est entré dans l'appartement, qu'il a vu le miroir, que tu lui as dit qu'il fallait mettre l'aquarium devant pour que je ne me vois plus dedans, il a cru qu'il pouvait repartir illico. Et c'est là que tu as dit la formule magique "ta femme avait les connaissances de toutes tes ignorances". Là il s'est dit que cela valait peut-être le coup de s'assoir pour t'expliquer qu'un aquarium d'un tel volume ne se plaçait pas dans la pièce comme un petit de 200 litres, qu'il se plaçait de l'autre côté du mur car il n'avait pas une petite boite noire pour filtre dans un coin du bac mais l'équivalent d'un second bac en contre bas, un bac qui ne se nommait plus filtre mais décante, qu'en gros c'était une mini statut d'épuration à domicile. Il t'a expliqué qu'il allait donc devoir couper le miroir, casser le mur, et utiliser la pièce derrière le mur. 

     

    Tu as répondu "d'accord" à tout. Il fallait couper le miroir. Qu'il coupe. Casser le mur, qu'il casse. Utiliser la pièce de derrière, qu'il prenne. Enlever le meuble de la pièce, qu'il parte avec si il le voulait.

     

    Je ne sais pas pourquoi je t'écris tout cela, puisque tu sais mieux que moi ce que tu as vécu.

     

    Le miroir de 428 cm sur 70cm a été coupé en trois et installé dans son entrée. Sa fille, une ado, adore. Il m'a raconté comment elle n'arrêtait pas de s'y regarder et d'affirmer que cela faisait "super classe". Il m'a dit qu'il avait mis du temps à comprendre qu'elle parlait du miroir non de sa tenue vestimentaire.

     

    Le meuble il l'a revendu à un antiquaire. Il n'en revient toujours pas de sa valeur. Valeur qu'il ne m'a pas donné. Il ne s'explique pas ta générosité. Au début il a cru que tu voulais qu'il déduise le prix du meuble de la facture des travaux, mais non, tu lui as bien précisé que le meuble n'ayant plus de place devait quitter l'appartement aussi qu'il était à lui s'il le voulait,  que tu te moquais de son devenir, que tu voulais juste conserver ce qu'il contenait. Je l'ai consolé en lui avouant que moi non plus je n'arrivais toujours pas à me faire à ta folle générosité. Bien sûr il a pensé que je faisais allusion à l'aquarium alors que je faisais référence à l'appartement. Je sais tu as couché mon nom au côté du tien sur les papiers "parce que je suis TA femme", mais si je le sais, je n'arrive tout de même pas encore à en démarrer l'assimilation. Bref nous avions convenu que tu étais de la race des anges.

     

    Cole je n'ai pas osé trop poser de questions mais je crois que cet homme avait des lourds problèmes financiers. Vu comment il en parle, le chèque  l'a libéré d'un énorme poids, j'en suis sûre.

     

    Revenons au bac.

     

    428 cm de long sur  70 cm de haut et d'une profondeur de 80.

    On obtient un volume de 2 396 litres.

     

    La résine qui forme un relief de pierre et qui est collée aux vitres des côtés comme du fond réduit le litrage final. Pareillement aux 4 énormes racines et aux 100Kg de sable de Loire. Les poissons n'auront pas plus de 1900 litres d'espace de nage. Ce qui est énorme. Énorme. Dans mon 800L à l'agence ils nagent dans 680 litres seulement. Vois la différence.

     

    Pour ce qui est de la décante de 450 litres, Monsieur Cortier m'a tout expliqué en menus détails. Il ne m'a rien appris mais cela lui a fait plaisir de raconter l'agencement. Le préfiltre en résine troué, les 40 kg de perlane pour le support bactériens, les 3 chauffages de 350W entre les 2 mousses bleues, les 2 kg de ouate, la pompe de 10 000L/H qui rejette en surface et celle de 3 000L/H qui rejette par le bas du bac.

     

    Cole je ne sais pas ce que tu as ressenti en vivant les quatre semaines de travaux chez toi, de l'agacement probablement à cause du bruit et de la poussière, mais pour moi ce bac ... Et encore plus quand Monsieur Cortier me le détaille, pour moi ce bac c'est ... Je ne sais pas quel mot convient le mieux mais c'est un diamant de 8 kg, un château en Bavière, une île au milieu d'un récif  corallien. Tout cela à la fois. Enfin je ne sais pas  résumer mon ressenti mais ce que tu as fait, c'est immense. Immense. De la démesure. Oui c'est cela : de la démesure. Tout ce qui me lie à toi est de l'ordre de la démesure.

     

    Alors tu vois quand Monsieur Cortier m'a dit que le gros moment de stress était maintenant, au moment de la mise en eau, car c'est à ce moment là que l'on va voir si il y a eu une mauvaise répartition des charges, je n'ai rien dit, rien fait. Quand il a tourné le robinet que l'eau a jailli, je ne suis pas sotte, j'ai bien compris que c'était grave mais je n'ai pas hurlé STOP non je lui ai juste promis que dans la journée j'irai cherché un litre d'aquasafe. Le produit qui neutralise le chlore de l'eau du robinet.

     

    Suis-je plus folle de l'avoir mis en eau que toi de l'avoir fait construire ?

     

     

    Je t'écris du salon. Il est 21h23 à ma montre. L'aquarium est éteint maintenant car il n'est éclairé que de 10h à 20h. En fait j'ai commencé à t'écrire quand il s'est éteint. Cole tu vas voir comme c'est beau. Les 7 plantes attachées aux racines font minuscules, mais comme on dit "ça a de la gueule".  Et puis elles vont grandir.

    J'aimerai qu'il te plaise aussi.

     

    Les poissons rouges sont comme les Cichlidés, ils mangent les plantes à feuilles fines. Les anubias et les microsoriums sont les seules qui ont une chance de survie. Quand je les ai attachées aux racines j'ai encore plus réalisé l'immensité de l'ouvrage. Je te jure, il a presque fallu que je rentre dans le bac. C'est hyper impressionnant. Quand j'ai eu le 800 à l'agence, je le trouvais géant, idem quand j'ai eu mon 450 après mon 180 que je ne jugeais pas petit. Mais là on est dans l'absolu démesure. Un peu plus et j'irai nager avec mes poissons. Je peux presque être une sirène.

     

    Cole tu ne touches à rien, s'il te plait. Tu peux juste vérifier que l'aérateur  fonctionne ( que des bulles sortent du sable) et que l'eau est toujours à 21°C. (Le thermomètre est à gauche non loin de la sortie des bulles). Le cycle de l'azote est en route, cela demande juste du temps.

     

    Et aussi que l'éclairage est ok. Tous les néons doivent toujours fonctionner, dès que l'un est mort il faut le changer. Si l'éclairage change, les paramètres de l'eau varient et ça ce n'est pas acceptable. 

     

    J'ai scotché la carte de visite de Cortier sur la couverture du cahier de l'aquarium que j'ai placé dans le tiroir du lavabo de la pièce de la décante. Au moindre problème n'hésites pas à le contacter. Ou moi ... Mais si je ne sais pas pourquoi, j'ai compris que mon téléphone ne sonnera jamais à cause (grâce ) à toi. Donc s'il te plait, au moindre problème, contact le.

     

    Je remonterai à Paris le vendredi 15 avril, soit dans un mois. Alors je ferais les tests pour voir les paramètres de l'eau.

     

    Ce sera la semaine entre nos deux anniversaires. Merci Hasard. Cela me ferait très plaisir de les  fêter avec toi. Et toi, aimerais-tu que nous les soulignons ensemble ?

     

    Monsieur Démesure, Je t'aime.


    8 commentaires
  • 67

    Paris

    Vendredi.

     

    Mon bel Amour,

     

    Je viens de passer une journée merveilleuse, radieuse, divine, sublime. Pas grâce à Grangé, je n'ai même pas ouvert son livre. Grâce à Madame Fioux que je rêvais de ne jamais rencontrer. Quelle erreur cela aurait été.

     

    " Mais vous imaginez quoi ? Que ma vie n'est que plaisir ! Arrêtez de me croire sans obligation, nous ne nous en porterons que mieux. Et tenez le vous pour dit. Est-ce compris ? "

     

    Tu n'as pas quitté l'appartement pour être là où je ne suis pas. Tu ne m'as pas fui. J'ai perdu 50kg de peine en une seconde. Je me suis sentie légère, si légère toute la journée ensuite. Un bonheur ! C'est fou comme on peut se détruire d'une conviction fausse.

     

    Oh Cole le bonheur pour moi de l'entendre me raconter ton départ. Elle a utilisé le mot contrarié. Tu avais l'air contrarié de devoir partir alors que j'allais arriver.

     

    Ta concierge est aussi mauvaise comédienne qu'elle est bonne concierge.

     

    J'imagine la scène. Tu descends l'escalier, un taxi t'append en bas. Elle te stoppe avec son sourire et son façon de vouloir être agréable alors qu'elle veut juste tout savoir. Elle a du te dire quelque chose dans le style "Comme c'est dommage que vous partiez alors que madame arrive pour le salon du livre"  et là digue d'une rafale de mitraillette tu l'as projetée dans le mur avec ton " Mais vous imaginez quoi ? Que ma vie n'est que plaisir ! Arrêtez de me croire sans obligation, nous ne nous en porterons que mieux. Et tenez le vous pour dit. Est-ce compris ? ".

     

    Ah menhir d'amour !

     

    Oui je suis sûre que tu l'as envoyée dans le mur. Elle te déteste autant que je t'adore. Elle s'est faite exploser dans le mur et moi j'ai décollée, je suis montée au firmament.

     

    Cette femme passe tellement de temps à masquer ses émotions pour plaire, qu'elle ne donne plus le droit aux gens d'être franc. Et toi, tu es au delà de la franchise, tu vis totalement détaché du regard des autres. Même moi, je suis sûre que jamais tu ne te demandes "que va-t-elle penser si j'écris cette phrase" non toi tu écris la phrase que tu veux écrire car elle résume ce que tu veux en obtenir, soit qu'elle passe le message. Tu présentes une liberté admirable : que j'admire. Et qui effraie Madame Fioux.

     

    Tu ne m'as pas fuit, tu as du partir d'urgence. Pas à cause de moi. Pour quelque chose d'important et de non prévu.

     

    J'ai littéralement volé toute la journée, une journée au salon du livre. J'en ai acheté 23. Je suis ruinée mais merveilleusement heureuse.

     

    Je t'aime mon amour.

    Ne change jamais.


    7 commentaires
  • 66

    Paris

    jeudi 17 mars 16.

     

    Beau Cole,

     

    Où as-tu passé ta nuit ? Tu as probablement mieux dormi que moi. Sans l'avoir décidé, j'ai passé ma nuit à attendre tes pas qui ne se sont jamais fait entendre. Je me suis levée triste, je me suis rendue à la cuisine déserte. Alors je suis entrée dans ton bureau pour me mettre dans les yeux ton lit non défait. Tu n'es pas là et je suis triste.

     

    Le mur m'a soutenue le temps que je me souvienne de nous. J'ai ensuite caressé le billard comme tu m'avais touchée alors qu'on y jouait.

     

    Certes je n'ai pas vécu beaucoup d'instant heureux. Mes histoires d'amour étaient toutes des histoires médiocres, même si je n'ai jamais connu l'enfer que certaines femmes s'infligent pour ne pas être seules. Je n'en veux à aucun de mes partenaires car même volontaire et désireuse, il y avait toujours une partie de moi qui restait emmurée. Pauvres hommes, ils partaient tout perdants. Tu vois souvent les gens disent "je voudrais trouver quelqu'un qui m'aime". Connerie. Les personnes qui nous aiment n'ont aucun pouvoir. Ils peuvent frapper à la porte de notre cœur avec poèmes, fleurs, et que sais-je encore, le verrou est à l'intérieur donc si une personne ne trouve pas l'élu qui l'aime c'est juste qu'elle ne s'autorise pas à aimer. Je sais cela depuis des lustres. Un jour j'ai lu une phrase qui résume qui je suis.

     

    Comment pouvoir croire qu'un inconnu nous aime

    alors que nos propres parents ne nous aiment pas?

     

    En substance elle disait cela.

     

    Je n'ai jamais aimé personne. J'avais cru aimer Serge. David aussi un peu. Je le lui ai affirmé. Je lui ai menti car je me mentais. Je n'ai jamais aimé Serge car ce que je ressens pour toi, je ne l'ai jamais ressenti pour lui. Cet homme me flattait, il me faisait vivre, il me sortait de mes romans, ma couture, de mes endormissements. Tu vois ce que j'ai aimé le plus en lui fut sa femme. Et son métier aussi. Il nettoyait des maisons brûlées. Donc entre ses déplacements et sa femme, ses gosses, il était l'homme idéal car on ne se voyait jamais. On se téléphonait beaucoup par contre. Comme on y a ri ! Je l'aimais mieux en son absence que sur le temps de sa présence, il était mieux dans mes scénario inventés que dans la réalité. Et tu sais pourquoi ? Parce quand il était en chair et en os devant moi, je n'étais plus qu'une emmurée. Je crois que je suis cette phrase du livre. Mes parents ne m'ont pas aimés donc personne ne peut m'aimer. Je crois qu'en moi il y a une logique qui se résume de la sorte : Si j'aime Serge, comme mes parents il va finir par vouloir vivre là où je ne suis pas et moi, je n'aurai que des larmes pour compagnie. Alors je jette avant d'avoir été jetée, je jette tellement vite que je ne démarre rien. Une emmurée je te le dis.

     

    Quand nous avons joué au billard je ne l'étais pas. Quand ta main s'égarait sur ma taille, chaque fibre de mon corps aspirait son énergie, sa chaleur, ta forte. Je capte tout de toi. Je suis libre. Je ne sais par quelle magie mais tous mes murs ont disparu. Il n'en reste rien.

     

    Pourquoi, comment j'ai pu casser mon mur parce que toi ? Qui es-tu pour moi ?

     

    Il y a une mythologie ridicule qui raconte qu'au ciel nous sommes par deux comme les grains de café ou les cacahuètes et que quand on descend sur terre, l'union se défait. Vivre devient une recherche de son complément. C'est poétique et con  à la fois. Depuis août 14, depuis que nous nous sommes vus je commence à y croire. Mais alors cela voudrait dire que nous vivons avant la vie. Et surement après la mort. C'est peut-être parce que je t'aime depuis trente mille ans que j'ai explosé mes murs en te retrouvant. C'est peut-être parce que je t'aime depuis trente mille ans que je me suis emmurée pour n'être qu'à toi, même si tu n'es pas là. Là on arrive sur une autre mythologie : Ulysse et Pénélope.

     

    Je t'aime veut dire tu m'as ouverte à la vie. Mon amoureuse est libre. Libre de m'offrir à toi.

     

    Cole mon amour, je peux mourir aujourd'hui car je sais maintenant ce qu'est l'infiniment beau. Il porte ton empreinte.

     

    Ce matin je suis bien restée une heure appuyée contre le mur, les yeux perdus dans notre soirée autour du billard. Je t'imaginais plus grand. Absurdité totale. J'aime que ta bouche soit à la hauteur de mon oreille quand tu viens te coller contre moi. J'aime que ton visage ne m'échappe pas.

     

    Tu sais combien de fois tu m'as touchée alors que les boules du billard attendaient d'être sorties du tapis vert ? 78 fois. Oui j'ai compté. Pas en février, ni ce matin, mais entre les deux. Chez moi, je me suis au moins repassée le film de notre soirée des dizaines de fois aussi je peux te dire avec exactitude que tu m'as touchée, effleurée, caressée, chatouillée, dessinée, arrêtée 78 fois.

     

    Pourquoi m'avoir repoussée Cole ?

     

    Pourquoi quand j'ai voulu t’embrasser Cole, pourquoi as-tu serré des mâchoires, oui tu as serré des mâchoires, avant d'affirmer qu'il était temps que j'aille me coucher, avant de m'abandonner dans ton bureau ? Tout de toi disait que tu en avais autant envie que moi. Alors pourquoi ?

     

    " Je crois qu'il est temps que tu ailles te coucher Mickaelle. Bonne nuit."

     

    Pourquoi as-tu dit cela ? Pourquoi as-tu fait ça ?

     

    Et maintenant pourquoi n'es-tu pas là ?

     

    Aujourd'hui je suis allée au salon du livre en prévu. J'y suis allée comme si c'était une corvée alors que j'en rêvais depuis des années. Une fois sur place je me suis sentie ridicule au milieu de cette foule immense. Je t'entends me dire "tu ne sais pas ce que tu veux". Ce n'est pas ça. Tu es mon essentiel, le reste est devenu secondaire, même mes plus vieilles priorités.

     

    Je sais ce que je veux. Ce dont j'ai besoin. Je veux ton torse. J'ai besoin d'une cure de toi. J'ai besoin de me blottir contre toi et d'y rester collée le temps de me ressourcer. Je suis comme une batterie déchargée qui a besoin de demeurer brancher des heures pour retrouver son optimum.

     

    Oui tu m'as fait casser mes murs mais maintenant je dépends de toi, je ne suis plus à moi.

     

    Cole pourquoi n'es-tu pas là ?

     

    Jeudi s’achève. Tu ne seras pas là sur les trois jours qui viennent non plus. Je ne suis pas sotte, je l'ai bien compris. Pourquoi tu me fais ça ? Qu'attends-tu que j'y comprenne ? Qu'attends-tu que j'y vive ?

     

    Demain je n'irai pas au salon du livre. J'ai acheté mon entrée pour rien. Demain je me noierais dans le dernier Jean Christophe Grangé que je n'avais pas encore. Il a une écriture plus forte que ta présence absente Cole. Enfin je l'espère. Grangé me sauvera ma journée. Je veux y croire. Et je vais aussi prendre le temps de regarder en détail mon cadeau de noël offert par Charles Welch.

     

    Non je n'ai pas acheté J.C.Grangé au salon du livre, je me suis arrêtée dans une librairie. C'est là aussi où j'ai pris  les trois autres livres. Je n'ai rien acheté au salon à cause de la foule. Elle m'a toujours tenue en retrait. Enfin elle n'est coupable de rien, c'est moi qui ne m'y mélangeais pas. Pas de force pour ça. Preuve que j'ai besoin d'une cure de toi. Je m’éteins peu à peu. A la fin du week-end il ne restera plus rien de moi.

     

    Minuit dépassé, je vais me coucher.

    Cole, mon amour, passe une bonne nuit où que tu sois allongé.


    2 commentaires
  • 65

    Paris

    Le 16 Mars 2016.

     

    Cole,

     

    Je suis chez toi et tu n'es pas là. C'est con je sais mais ton absence, ce grand appartement vide, c'est comme une gifle que j'aurais reçue. Pas une seconde je ne m'étais dit "attention il peut ne pas être là". Tout le temps du voyage j'ai roulé vers toi. Avant j'avais fait mes valises pour aller à toi.

     

    Et c'est le vide, le silence qui m'ont accueilli de leurs bras glacés. Toute ma joie et je te jure qu'elle était concentrée, est tombée sur le paillasson que ta porte n'a pas.

     

    L'an passé quand nous avions évoqué le salon du livre tu m'avais promis que tu me laisserais l'appartement, mais j'avais oublié, et toi aussi tu l'avais oublié car tu as écrit dans ta lettre que je pourrais résumer du mot VIENS, que tu serais là tout le mois de mars.

     

    Nous sommes au cœur de mars et le mien a de la peine. Où es tu Cole ? Pourquoi n'es-tu pas là ?

     

    Je ne m'attendais pas à ce que tu m'accompagnes chaque jour au salon du livre mais je te voulais chez toi. Je m'étais même imaginée le rater un peu pour demeurer avec toi. Quelle sotte ! Tu n'es pas chez toi.

     

    Enfin chez moi, ou plutôt chez nous.

     

    J'ai très très bien compris ce que tu m'as expliquée. Ton grand-père a voulu te faire entrer dans les sociétés Welch pour en éloigner son fils Charles et en garder le contrôle via toi sa marionnette de paille. Avec celui-ci, à la mort de William, tu as passé un marché. Charles récupère les pleins pouvoirs des entreprises, et toi tu gagnes l'orphelinat et deux trois autres choses donc l'appartement avenue Foch. Pour l'appartement le contrat stipule que seuls toi et une personne de ton choix avez le droit d'y vivre et ce jusqu'au 11 avril 2065 soit jusqu'au jour de tes cent ans. Si tu meures avant, l'autre personne peut désigner une tiers personne pour te remplacer, etc. En Conclusion jusqu'au 11 avril 2065 seuls deux personnes sont occupants de l'appartement mais  toutes les factures liées à l'appartement sont payables par la famille Welch. Autrement dit mon spacieux cadeau de noël : Merci Charles et si je veux une bibliothèque pour trois mille livres : Merci d'avance Charles Welch aussi.

     

    J'ai compris tu vois Cole, j'ai un très grand chez moi gratuit mais je n'ai pas compris pourquoi tu m'as nommée moi. Je t'aime. L'expression est banale et insipide elle me semble tellement au dessous de ce que j'éprouve pour toi, cependant si les rôles avaient été inversés, je n'aurais toujours pas additionné ton nom au mien. La franchise manque de délicatesse et encore plus de noblesse comme souvent. Pardon.

     

    Tu as couché mon nom sur le papier avant de m'avoir donné ton nom de famille. Tu es sidérant comme homme.

     

    Je vois encore, non, je ressens encore la puissance de tes yeux noirs qui pénètrent en moi quand tu m'as dis "parce que tu es ma femme". Et tes mains, tes paumes, tes doigts qui enserrent mon visage pour m'obliger à absorber jusqu'à la lie l'énergie de la déclaration.

     

    Tu as posé mon nom au côté du tien, mi avril 2015,  parce que je suis ta femme.

     

    C'est une chose de le lire, c'en est une autre de l'entendre.

     

    Dans tes yeux, dans ta voix, dans ton corps d'ailleurs il y avait de la fermeté comme si le message n'était pas "tu es ma femme" mais "mets toi dans le crâne que tu es ma femme". Il en est aussi, sujet clos.

     

    Oui tu es un être sidérant. Autre exemple. A l'opposé. Il y avait tellement de velours dans ta voix quand tu m'as répondu "non merci" alors que l'annonce était glaciale en soi. Dans la voiture BlaBlaCar qui me ramenait chez moi je les ai ruminés longtemps ces deux mots. Non Merci. Je te propose de t'appeler à mon arrivée. NON MERCI. Aujourd'hui je suis convaincue que tu ne veux pas que je possède ton numéro de téléphone. Pourtant ce soir j'aurai aimé pouvoir t'appeler pour à mon tour te dire VIENS.

     

     

    Je t'écris de la cuisine d'où j'ai le plus admiré tes cheveux. Il y a tant et tant d'hommes qui se rasent le crâne, toi tu as les cheveux qui descendent jusqu'aux épaules. J'adore ça. Tu n'imagines pas comme je me suis retenue d'y passer les doigts.

     

     

    Je vais laisser cette lettre sur la table car tout au fond de moi et en surface aussi, je rêve que tu sois juste en rendez-vous non loin d'ici et que tu vas rentrer dormir, que demain je te retrouverais dans la cuisine en train de te préparer ton épouvantable petit-déjeuner. Tartines de camembert pour tremper dans ton café beaucoup trop concentré et des œufs au lard fumé.

     

    Bonne nuit Cole où que tu sois.


    10 commentaires
  • Châteauneuf-du-Faou

    Le 28 Février 2016.

     

     

    Mon amour,

     

    Je ne voulais pas t'écrire, je voulais que tu commences, mais dans les lignes du livre que je n'arrive pas à lire puisque sur la totalité des jours j'ai l'instant sublime en superposition du réel, il y a cela :

     

    " Comme si l'amour du maître s'écoulait de ses paumes à la façon d'un nectar lumineux, dissolvant toute peur et faisant s'épanouir le meilleur de lui-même".

     

    Dans le livre le maître est un Rinpotché. Tu es mon très précieux.

     

    Quand tes mains ont entourés mon corps, quand ton torse est venu renforcé mon dos, il n'y eu plus qu'un sublime  admirablement résumé par  cette phrase.

     

    Je ne sais le temps qu'a duré cet instant merveilleux, mais il est la survivance de nous. Tout le reste n'est que détails, décors, compléments. Ce souvenir me hante à la façon d'un bonheur éternel. La félicité de cet instant m'habite, me décolle de l'existence.

     

    Bien sûr pour toi  l'essentiel est peut-être ailleurs mais pour moi le concentré d'amour s'est diffusé en moi quand tes mains ne cherchaient rien, quand mon souffre s'est posé sur ta respiration, quand ma gravité fut en toi.

     

     

    Je continue le livre et je trouve deux pages plus loin:

     

    "On n'a jamais envie de quitter le maître. On voudrait se fondre en lui, comme un flocon de neige qui tombe dans un lac."

     

    Cet instant pour moi fut exactement cela. Et ce désir est toujours aussi vivant.

     

    Voilà deux jours que nous nous sommes quittés, deux jours que je ne suis plus celle d'avant. Tu as libérée une partie de moi que je ne me savais pas. Une Amoureuse.

     

    Je t'aime Cole bien plus qu'il ne me semblait possible d'aimer.

     

    Ta sirène au paradis.

     

     

    PS : Rinpotché signifie très précieux mais je ne doute pas que tu le saches déjà.

     


    2 commentaires
  • 63

    Mickaelle,

     

    Toute petite fille qui ne sait pas ce qu'elle veut, tu peux venir le jeudi que tu veux, si tu le veux encore.

    Je suis sur Paris et y demeure sur la fin du mois et tout mars.

    J'ai comme dans l'idée que je ne te verrai pas.

     

     

    Paris le 19 Février 2016.

    C.A.T

     

    Ps : Dis à Maxime que je n'ai pas du tout le compte bancaire qu'elle me croit.


    10 commentaires