• 54

     

    Bonjour Mickaelle,

     

    Dans les années 1950, un rituel s'est installé au sein de la famille Welch de Jefferson City USA. Sur Mai ils vont se reposer en Grande-Bretagne, puis en Juin ils passent en Italie et ils finissent leur périple sur Juillet en Russie. Charles, sa femme Jessie et leurs enfants Susanne et Robert perpétuent toujours la tradition. Susanne est pourtant devenue Madame Hap Townes et est mère des jumeaux Jason et Ryan.

     

    En 1964, Alesh Sergueïevitch Tchigrenkov avait 27 ans. Celui qui devint mon père était employé dans un grand Hôtel à Saint Pétersbourg. J'ignore le poste qu'il y occupait, je sais juste qu'il n'en était ni le directeur ni son second, qu'il était du nombre du petit personnel utile et invisible.

     

    Au début des années soixante si les Welch possédaient une résidence en Grande-Bretagne et une seconde en Italie, ils n'avaient toujours pas investi en Russie, aussi ils  séjournaient chaque année dans l'hôtel où travaillait mon père.

     

    Juillet 1964 fut très délicat pour les entreprises Welch. William dut rentrer précipitamment à Jefferson City. Bertha sa femme l'y rejoint fin juillet comme à l'ordinaire. Ce qui ne le fut pas par contre, c'est qu'elle laissa  derrière elle sa fille Maude âgée de 19 ans et son fils Charles de 6 ans son aîné.

     

    En 1964 Maude et Alesh se connaissaient depuis des années. 5 ans à en croire les lettres de mon père. Mon père avait donc  être embauché dans cet hôtel en 59 alors qu'il avait 22 ans, car les Welch y descendaient déjà sur 55 voir 53. Maude n'avait encore que 14 années quand mon père posa les yeux sur elle pour la première fois.

     

    Pourquoi en 1964 Bertha laissa ses enfants dernière elle à Saint-Pétersbourg ? Rien n'est dit dans les lettres de mon père que je relis en guise de consolation. ( Pourquoi n'ai-je plus le droit de te lire Mickaelle ?) Charles que j'ai interrogé il y a quelques années déjà, n'en a pas souvenance. On ne peut donc qu'émettre des hypothèses. L'âge des enfants ? La confiance en eux ? Le désir de les garder éloignés des USA où William restructure l'affaire familiale ? Je ne le saurais jamais.

     

    Ce que je sais parle de moi.

     

    Libéré de sa mère, Charles ne joua pas les chaperons de sa soeur, aussi ce fut des plus librement que Maude prit Alesh pour amant. Aucun détail ne me manque. Je sais toutes leurs premières fois. Premiers mots échangés, premières rencontres d'un hasard bien trafiqué, premières mains unies, première joue caressée, embrassée, premier baiser d'elle, de lui, et bien sur première fois qu'il la déshabilla, qu'il lui fit l'amour. Sur les pages de mon père il y a plus d'amour que de mots.

     

    Quand William et Bertha Welch ont eu connaissance de la grossesse de leur fille, ils ont rapatrié Charles au USA mais n'ont pas séparé les amoureux.

     

    J'avais 29 ans soit 2 années de plus que mon père, quand j'ai eu pour la première fois ses lettres entre les mains. Il note que le départ précipité de Charles, et l'autorisation à Maude de demeurer à l'hôtel, ont été pour eux, preuve que  William Welch consentait à leur union, à ma conception.

     

    Mon père était amoureux, je suis riche de la connaissance de leur avenir, mais je n'arrive pas à croire que j'aurai réagi comme lui, comme eux. Si William et Bertha consentaient au choix amoureux de leur fille, pourquoi éloigné Charles ? Pourquoi ne pas au contraire rencontré Alesh ?  Pourquoi ne pas le faire entrer aux états unis avec Maude ?

     

    Maude et Alesh mes parents n'ont vu que de la liberté là où moi je sais qu'il n'y avait que danger. Sur les neuf mois de ma conception ils ont vécu comme vivre tous les amoureux libres de s'aimer.

     

    Je suis né le 11 avril 1965 à 2h32 du matin. Dans la matinée de ce même 11 avril 65, mon père coupable d'avoir couché avec une mineur américaine, a été arrêté à l’hôpital maternité  et a été conduit au goulag d'où il n'est ressorti que mort le 27 septembre 1979 soit 14 années, 5 mois et 16 jours plus tard, à l'âge de 42 ans.

     

    Durand ces 173 mois 1/2 il a écrit à ma mère 741 lettres. Il les a toutes postées à l'adresse de la demeure des Welch à Jefferson City où il nous croyait ma mère et moi.

     

    Certaines sont assez courtes, pas plus d'une demie-page mais la majeure partie dépasse les trois feuilles format A4. Elles sont rédigées en écriture cyrillique, ce qui fait qu'aucun Welch n'a pu les lire. Les premières, même pas une dizaine sont ouvertes, mais ensuite personne n'a eu la curiosité de les décacheter. Je suis le seul à avoir lu mon père.

     

    Il n'y parle jamais de lui. Je n'ai donc aucun détail sur ses activités au Goulag, sur sa santé, sur ses relations avec ses geôliers ou ses co-détenus. Les lettres ne sont jamais datées. Certaines ont la même date sur le cachet de poste comme si la personne qui les lui postait, attendait d'en avoir plusieurs ou ne pouvait se rendre à la poste que certains jours.

     

    Alesh mon père ne sut jamais que le jour même de ma naissance je fus enfant de l'orphelinat Spasibo de Saint Peterbourg et que six jours plus tard ma mère épousait sur l'ordre de son père, à Plooysburg en Afrique du sud un certain James Robinson, un homme de 48 ans.

     

    Si ma mère avait reçu les lettres elle aurait du faire appelle à un traducteur car elle ne parlait pas le russe et l'écrivait encore moins.

     

    Mon père connaissait les formules de politesse américaines et les mots les plus couramment entendu dans un hôtel, mais il n'était pas bilingue. En Russie les élèves apprennent l'anglais en première langue étrangère et le français en seconde, mais je doute que mon père est suivi de longues études. Il ne semble pas qu'il était à l'hôtel en tant que personnel à mis-temps pour payer ses études. La vérité est que je ne sais rien de lui. Il n'apparait pas dans les archives de l'hôtel alors qu'il écrit à plusieurs reprises qu'il avait vu ma mère dès 59, preuve qu'il y fut employé au minimum 5 années. Quant aux archives du goulag, autant vouloir retrouver trace d'une arête de poisson au fond de l'océan. J'ignore tout de ses parents, de sa possible fratrie. C'est même miraculeux que j'ai réussi à retrouver sa tombe, enfin ... son lien d'enfouissement.

     

    Monsieur William Welch, l'homme que Madame Fioux trouvait si humain quand elle le rencontrait dans les escaliers de l'immeuble avenue Foch a géré sa fille comme n'importe quel autre contrat. James Robinson pour mettre Maude dans son lit a lâché une mine de Diamants en Afrique du Sud. Elle est propriété de Charles aujourd'hui.

     

    Mon père a écrit 741 lettres à ma mère sans jamais recevoir de réponse. Il n'a jamais cessé d'affirmer que sa vie valait la peine d'être vécu car il avait l'amour d'elle en lui, de lui pour elle en lui.

     

    Mickaelle je ne suis pas mon père, répond moi. C'est toi qui a commencé cette correspondance, tu n'as pas le droit de me condamner au silence. Je suis sans nouvelle de toi depuis début Août, écris moi. Parle moi de l'amour que ton mari n'a pas su te donner.

     

     

    Paris- le 6 Octobre 15.

    C.A.T

     

     

    PS:

    J'ai trouvé le cadeau que tu m'avais laissé. Merci de l'attention.

     

    Madame Fioux m'a demandé si tu allais me rejoindre ici, je lui ai répondu que tu ne raterais le salon du livre 2016 pour rien au monde. Si je ne retourne pas au hameau avant le mois de mai, je te fais la promesse que je déserterai l'appartement pour te le laisser sur mars. Les affaires m'obligent à monter en Russie fréquemment, quand tu seras à Paris, j'y serai donc. 

     

     

    Réalise ton rêve même si tu as décidé de ne pas assouvir mon vœu de te lire encore. Tu te le dois.


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  • 53

    Mickaelle,

     

    Je n'ai pas souvenance précise du contenu de mon courrier mais il est impossible en toute bonne fois de le résumer tel que tu l'as fait.

     

    Il y avait une accusation de silence de ton fait. Précieuse insolente tu continues à taire l'unique raison de cette correspondance.

     

    Mickaelle,

    Pourquoi m'écris tu ?

    Que me caches-tu ?

    Tu te joues grande dame mais tu te dérobes encore. Ne fais pas diversion, cela ne marchera jamais avec moi.

     

    Pourquoi as-tu voulu cette correspondance ?

     

    J'exige la vérité. Maintenant. Ne crois-tu pas qu'il est temps d'assumer qui tu es ?

     

     

    Le hameau, le 19 Août.

    C.A.T


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  • 52

    Châteauneuf-du-Faou

    Le Jeudi 13 Août 2015.

     

     Monsieur Colerige Alesh Tchigrenkov,

     

    J'ai relus ta lettre plusieurs fois. J'avoue qu'elle me peine. Passé le choc, je pense qu'elle se résume en deux parties.

     

    1)  Tu m'envoies à la tête un gros bloc de glace . Je ne vois pas d'autre explication que l’hypothèse que je t'ai blessé. J'ai du faire ou écrire à Paris quelque chose de mal à tes yeux et tu me renvois ta colère. OK.

     

    Tu as le chic pour me faire passer par toutes les cases de la palette des émotions, toi.

     

    Qu'ai-je fait de mal ? Une femme de ton rang social ne parle pas à une concierge ? C'est ça ? Et bien la prochaine fois que tu la verras tu lui annonceras notre divorce et tout rentrera dans l'ordre.

     

    2)  Me répondre que je suis la propriétaire de l'appartement c'est vraiment ridicule. Dis moi que je n'ai pas à le savoir, ou ne reviens pas sur la question comme tu as su si bien le faire sur une demie douzaine de questions, écris"jocker" mais ne me prend pas pour une dinde, c'est ridicule. Je sais très bien ne pas être propriétaire de cet appartement. Et j'ajoute en être ravie, les taxes d'habitation et foncière vont bientôt tomber, celles de mon petit appartement me suffisent.

     

     

    Hier je me suis "engueulée" avec Stoyan à cause du bassin. Il dit que je ne sais pas ce que je veux. Aujourd'hui c'est toi qui a des choses à me reprocher. Et on dit que ce sont les femmes qui sont compliquées !

     

    Mickaelle.


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  • 51

    Mickaelle,

     

    A quoi  joues-tu TOI ?

     

    Welch est le nom de jeune fille de ma mère. Il  figure sur mon extrait de naissance mais pas sur mon passeport. Il est malheureusement bien utile parfois.

     

    Je ne mens jamais.

    Tu es bien mal placée pour me faire la moral, Sirène.

     

    Tu passes ton temps à me mentir. Tu me crois assez naïf pour gober ton histoire de midinette : Nos yeux dans les yeux blablablabla. J'ai vécu l'instant autant que toi. Jamais tu ne me feras croire que c'est ce qui a motivé cette correspondance. Alors commence par être honnête avant de m'accuser de mensonge.

     

    Tu peux peut-être duper Stoyan et faire ton patron répondre à tous tes caprices de petite fille, mais cela ne marchera pas avec moi. Si tu ne l'as pas encore réalisé c'est que tu es stupide, et ça vois-tu je n'y crois pas une seconde.

     

    Grandie Mickaelle, l'enfance est finie depuis longtemps.

     

    Le 30.07.15 -

    CAT.

     

    PS : Cet appartement est à toi, pas à moi, à toi.


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  • 50

    Ton antre

    Le 20 juillet 2015.

     

     

     

     Bonsoir Monsieur mon mari,

     

    Comment je t'appelle dans l'intimité : Bébé (trop tarte), mon amour (trop long) Chéri (certainement pas, je déteste). Et toi, dis moi, quand tu veux un petit plaisir rapide entre deux rendez-vous, tu me nommes comment ? Ah je sais, poupée ou poulette mais en russe. Oui au lit tu dois parler russe. Ce doit être terrible pour toi d'avoir épousé amnésique.

     

    Tu me fais peur Tchig. Je ne rigole pas, tu me fais vraiment peur.

     

     

    Il y a onze mois je marchais sur un sentier de randonné dans le beaufortain en compagnie de Maxime. Passé un virage la perspective s'ouvre. En fermeture d' horizon sous de maigres nuages,  devant un ciel d'un bleu dilué, une lourde montagne coupée à la hache, et en avant plan d'elle, comme logé au fond d'une cuvette en herbe grillée par le soleil, un minuscule groupe de petits points qui semblaient constituer un hameau. 

     

    Nous n'avions pas été prévenues qu'il existait des habitations entre le lac et sa source, la chute d'eau,  but de notre expédition.

     

    Le chemin nous a obligé à passer au plus près du hameau. Alors je t'ai vu sur ton mur. J'ai découvert un homme aux épaules puissantes portant un vieux jeans et un T-shirt jaune douteux au col tunisien qui tout autant que le jeans méritait bien plus la poubelle que la machine à laver. J'ai vu un homme mal rasé avec un bandana noir noué sur une chevelure grisonnante et fournie. J'ai constaté une paire de baskets montantes à la semelle décollée. Et je n'oublie pas les lourds gants de chantier qui semblaient te momifier les mains.

     

    Nous nous sommes regardés sans honte et sans espoir, juste retenus par le sublime qui émanait d'un nous improbable. Quand je repense à cet instant oui, je peux dire qu'alors tu n'étais que liberté, générosité et confiance offertes,  que cet homme était celui là même qui, il y a quelques jours a placé ses clés d'appartement dans une boite pour moi.  Là maintenant je le réalise. Ce geste fou, démesuré est totalement en accord avec la pleine bonté qui se dégageait alors de ton être. Si je n'avais pas oublié qui tu es vraiment, découvrir les clés n'aurait pas du m'étonner. Si j'en fus si désorientée c'est seulement que je suis bien incapable d'autant d'humanité désintéressée.

     

    Qu'y avait-il entre nous ? 3 mètres ? Seulement 2. Tu étais à cheval sur ton mur, moi au sol sur le sentier. Il m'est impossible de me souvenir de la couleur de tes iris, la distance n'a jamais du me permettre  de le savoir. Je sais juste qu'une énergie inconnue, qu'une puissance de toi est entrée en moi. Je ne sais par quel pouvoir tu es parvenu à me figer sur place, à m'hypnotiser, à me désinhiber au point de me transformer en une femme libre d'accorder du temps à son désir de contemplation pour une dégustation quasi charnelle. C'était un peu comme si le socialement correct s'était déactivé de mon gouvernail mental.

     

    Avec toi, il n'y a plus de loi, plus de norme, plus de socialement correct. Avec toi il y a juste un divin lien d'amour astral. En un autre lieu, en un autre temps, il est possible que nous nous serions croisés sans nous isoler du décor, mais là, plus que de nous faire nous remarquer, nos âmes se sont désincarnées pour fusionner et par là même, nous enrichir de la substance de l'autre.

     

    Sur des heures, j'en ai senti  les effets. Tu m'avais rendue  vivante et belle comme jamais. Merci.

     

    Maxime n'a pas capté ton  pouvoir magnétique, elle est restée sur le plan matériel, superficiel, elle a eu peur de toi. Tout comme moi maintenant.

     

    Tchig tu n'imagines pas les efforts que je produis pour m'accrocher à mes souvenirs d'il y a onze mois. Il me semble qu'il n'existe pas d'autre solution pour réduire cette peur.  Tchig tu me fais peur. Là, maintenant si je te voyais apparaitre devant moi, je ne serais que débordement de panique.

     

    Ensuite au village, on nous a raconté que tu étais un tueur de tchétchènes, un sale individu violent qui se cachait. Je n'y ai pas cru. Aujourd'hui je ne sais plus.

     

    On nous a aussi dit que suite à une agression d'enfant, de ta part (chapeau l'artiste) les villageois furieux étaient montés chez toi et qu'ils en étaient revenus sans t'avoir vu, avec des images de chalet miséreux. J'avais bien vu qu'aucun fil ne reliait ta maison aux réseaux d'électrique ou de télécommunication. Il parait que  tu ne possèdes même pas l'eau courante. Riche de ces informations j'imaginais ton antre parisien du même acabit.

     

    Tu m'as confié avoir été élevé dans un orphelinat, que ton père pendant ce temps était au goulag, et comme tu te nomme Tchigrenkov, je t'ai cru un russe émigré en France, un sans papier peut-être même. J'ai pensé que Mr Welch était comme toi, un cabossé de l'existence. J'ai pensé que vous partagiez une chambre de bonne. Stoyan quand il est arrivé en France, il s'est retrouvé avec d'autres bulgares qu'il ne connaissait pas, des bulgares qui comme lui venaient du même réseau,  pour faire le même job saisonnier. Je ne me suis pas questionnée plus, j'ai posé sur toi, son passé. Welch ne me semble pas très russe comme nom, mais qu'en sais-je ? Quand j'ai rencontré Stoyan j'aurai juré qu'il était un africain du nord (Algérien - Tunisien) et non un homme de l'est.

     

    Dans ta lettre tu notes "dernier étage". Les chambres de bonnes sont toujours au dernier étage, au moins dans tous les livres que je lis.

     

    Entre la maison d'Henriette et mon appartement atuel, j'ai connu les chambres chez l'habitant, les appartements de 18 m², alors je m'imaginais ouvrir une porte sur quelque chose du même genre, avec peut-être un peu moins de peinture, un peu plus de moisissure. La TV présente tant et tant de reportages sur les logements insalubres à Paris, que j'ai cru prendre le train pour aller dormir dans un lieu guère mieux.

     

    De tenir tes clés dans mes mains , c'était déjà tellement d'émotion que pas une seconde je n'ai songé à déplier le papier sur lequel tu avais écrit l'adresse. Il faut dire que j'ignore tout de Paris, donc un chiffre d'arrondissement, un nom de rue ou d'avenue ne m'aurait rien dit.

     

    J'aurai du aller sur mappy et y taper ton adresse.

     

    Si je l'avais fait, jamais, tu m'entends JAMAIS je ne serais là assise par terre, à t'écrire les coudes appuyés sur ta table basse. Non, jamais je n'aurais pris le train. Jamais.

     

    Dans le train justement j'ai déplié le papier et j'ai demandé à la femme assise à mon côté si le 16ème arrondissement était loin de la gare Montparnasse. Elle m'a toisée avec mépris et ne m'a pas répondu. J'ai traduit que c'était le pire arrondissement et que c'était pour ça qu'elle ne voulait pas m'adresser la parole. Je me suis dit "Encore une qui vote Le Pen" et dans mon coeur je t'ai défendu. "Oui c'est un immigré sans papier, mais c'est quelqu'un de très bien". 

     Tu dois te marrer.

     

    Paris 16ème !

    23 avenue Foch.

     

    J'ai lu 23 avenue Foch Paris 16ème. Pour moi cela ne voulait rien dire.

     

    J'ai passé toute mon enfance en banlieue de Limoge, je sais très bien m'orienter en centre ville. Tous les arrêts de bus ont des cartes. C'est mille fois plus facile de se repérer en ville qu'entre les champs de la Bretagne profonde où je vis maintenant.

     

     

    Il faisait beau, j'y suis allée à pied. Gare Paris Montparnasse, avenue Foch.

     

    Quand j'ai vu l'arche de Triomphe, je ne suis dit que je m'étais trompée, mais j'avais le panneau sous les yeux.  Avenue Foch Paris 16.

     

    Je me suis sentie pauvre en descendant l'avenue, en longeant les grilles , en levant les yeux sur les immeubles grands luxes. Pauvre pour ne pas dire minable. Non jamais je ne serais montée dans le train si j'avais été sur mappy avant.

     

    L'immeuble avant le 23 est une ambassade. Une ambassade ! Tes voisins sont les ambassadeurs de l'Angola. Moi mes voisins sont laborantins ou intérimaires. Et oui, j'habite contre le mur du laboratoire d'analyses médicales. Enfin c'est à vendre, il a été transféré sur Landerneau. Mais l'agence intérim ne manque pas de chômeurs.

     

    J'ai osé pousser la grille du 23 en me raccrochant à l'idée que j'allais aller me terrer dans ta chambre de bonne. J'avais même envie que Mr Welch soit là. Je me sentais tellement étrangère, miséreuse. Tu vois je crois que j'aurai même adoré que ce soit Mademoiselle Welch ta mademoiselle plaisir au lit. C'est vrai pourquoi n'avais-je pas pensé que tu puisses avoir une petite amie sur Paris ? Mais parce que Mr est mon mari et que Mr mon mari n'est pas homme à regarder ailleurs.

    Tchig c'est quoi le but de ta manœuvre ? Tu me fais peur Tchig.

     

     

    Bien sur la grille n'a pas bougé quand je l'ai poussée. On ne rentre pas comme ça chez les gros riches. Alors j'ai pensé à l'interphone. J'ai regardé et j'ai trouvé ton nom. En tout premier Welch-Tchigrenkov. De lire Tchigrenkov m'a rassurée. La clé a fonctionné, et elle a re-fonctionné pour la porte de l'immeuble.

     

    On ne voit ça que dans les films. Le hall d'entré est immense, l'escalier est en marbre, ou un truc comme ça. Il est recouvert d'un tapis (on dit moquette ?) rouge d'une épaisseur incroyable. Je n'ai pas fait la pauvre, je ne l'ai pas touchée. Enfin si mais seulement une fois là-haut quand plus personne ne pouvait me voir. 

     

    Et l’ascenseur ! L'ascenseur ! Une merveille, une pièce de musée. Un escalier en colimaçon avec en son centre, un ascenseur en fer forgée. Je sais que tu sais tout ça, je sais que mon vocabulaire ne doit pas être adapté. Mais songe à ce que cela m'a fait d'arriver dans ce hall, moi qui vit sous les toits d'une commune quelconque d'une région agricole, moi qui pensais découvrir un immeuble insalubre.

     

    Je suis montée par l'escalier en suppliant les Dieux que je ne croise personne avant d'être enfermée en sécurité dans ta chambre de bonne. Mais bien sûr que je suis sotte. Les bonniches ont un escalier ailleurs, un truc raide en ciment brute. L'escalier aux marches plus larges que ma cuisine ne peut pas aboutir sur des chambres de bonnes.

     

    Tu as écrit que je ne peux pas me tromper, que c'est la porte à droite. Il n'y a aucune autre porte. Il y a juste une porte, la tienne. Donc en effet, je ne pouvais pas me tromper.

     

    Tu crois que j'ai ressentie quoi quand j'ai ouvert la porte est que j'ai vu un couloir d'appartement aussi long que l'immeuble, et aussi large que les pièces de mon appartement ? Tu crois que j'ai ressenti quoi quand j'ai regardé par la première porte vitrée ouverte et que j'ai vu un salon de 80m² avec un mur entier en miroir ?

     

    C'est horrible Cole d'être assise seule sur le canapé pour 12 en cuir blanc et d'avoir face à soi, soi assise sur le canapé en cuir blanc. C'est pour ça que je t'écris assise par terre avec le miroir dans le dos.

     

    Il mesure combien cet appartement ? 200 - 250 m² ? J'ai ouvert toutes les portes sans entrer dans aucune pièce. J'ai cherché une chambre . J'ai vu les 3 bien sûr. Chaque chambre est un appartement. En plus d'un lit il y a toujours un bureau et un canapé.

     

    Et puis j'ai sursauté. Quelqu'un a sonné à la porte. J'ai eu peur.  C'est con mais j'ai eu peur. J'ai eu peur que ce soit toi. Tu te rends compte, j'ai eu peur que ce soit toi. C'est moche. Je sais c'est moche mais j'ai eu peur que ce soit toi.

     

    Devais-je aller ouvrir ?

    Pourquoi tu sonnes alors que tu as les clés ?

    J'étais incapable de bouger.

     

    Cela a re-sonné. Je me suis dit que tu m'avais donné les clés que je n'étais pas une voleuse, alors j'ai rassemblé mon courage et j'ai retraversé le couloir (j'étais dans la cuisine avec sa table pour 28 , ok pour 8) et je suis allée ouvrir.

     

    Voici la conversation ( à quelques mots près, excuse moi, elle te la relatera ultérieurement peut-être avec plus de justesse)  :

     

    - Bonsoir Madame Welch Tchigrenkov, honoré de faire votre connaissance.  J'espère que vous avez fait bon voyage ?

    - Oui... Merci... Bonsoir.

    - Comme votre mari me l'a demandé, je suis allée vous acheter une collation pour ce soir. J'ai tout rassemblé dans ces deux papiers. Celui-ci est particulièrement lourd. Voulez-vous que j'aille vous le déposer à la cuisine. Par exemple ?

    - Euh non, non.

    - Je vous souhaite la bienvenue à Paris Madame Welch Tchigrenkov. Si vous avez besoin d'autre chose, n'hésitez pas à me le demander. Votre mari tient à ce que votre séjour soit des plus agréables. Il a bien appuyé sur ce point. Bonsoir.

    - Attendez Madame. S'il vous plait.

    - Oui, il vous manque quelque chose Madame Welch Tchigrenkov ?

    - Non non tout est parfait, mais, je vous dois combien ?

    - Pardon ?

    - Pour les paniers. La facture.  La facture est dans l'un des paniers ? On fait comment ? Je vous paie maintenant, juste le temps que j'aille chercher mon carnet de chèques ou demain matin cela ira.

    - Mais madame, votre mari monsieur Welch Tchigrenkov s'est occupé de tout. Vous ne me devez rien. Je suis heureuse d'avoir fait votre connaissance, je ne savais pas monsieur marié. Il faut dire qu'il n'est pas homme à exposer sa vie. C'est un être très discret. Je vous souhaite une bonne soirée encore Madame Welch Tchigrenkov.

     - Pareillement.

     

     

    Tu avais écrit : Un peu de riz, des nouilles et des boites de sardines. Je n'ai trouvé aucun des trois. Par contre,  j'ai des fruits pour une semaine si je m'en fais une orgie et si j'ai encore faim après avoir consommer les pains, les fromages, les beurres, les charcuteries, les salades composées et bien sur bu toutes les variétés de thé, café et tisane, sans omettre le vin. Tchig tu lui as fait en acheter pour un régiment.

     

    J'ajoute qu'elle n'a pas oublié la bouteille de champagne et les roses. Monsieur mon mari est délicat.Tortionnaire avec sa concierge mais délicat envers son épouse adorée.

     

    Tu me rappelles depuis quand nous sommes mariés s'il te plait. J'oublie comment j'ai tué mon frère, j'oublie comment mon mariage fut célébré... Je suis lamentable.

     

    J'essaie d'y mettre de l'humour, mais je suis moins sûr de moi que j'ai voulu le faire croire à ta concierge. Je panique en vrai. Je suis venue à Paris torturée par la question : je poste ou non les cartes que Maxime m'a donnée, et maintenant je me demande si je n'aurai pas du prévenir la concierge que je ne suis que Mickaelle Kervelou. Tchig j'ai joué ta femme pour ne pas te discréditer mais encore plus car tu me fais peur, même à distance, tu me fais peur. Et ta concierge ne semble pas non plus très à l'aise face à toi. Maxime, Stoyan, personne ne sait  que je t'écris, personne ne sait où je loge ce soir. Je regrette de n'avoir rien dit. Je regrette encore plus d'avoir pris le train.

     

    Qui es-tu  Tchig ? Tu me fais peur. Comment peux tu être propriétaire de cet appartement ? As tu vraiment du sang de tchétchènes sur les mains ? Tu es de la mafia russe ? Question ridicule, si tu l'étais tu ne l'avouerais pas.

     

    Cole je ne suis pas du tout à l'aise dans ce géant silence.  Je reste accrochée à mon stylo car en pensant à toi, celui de la Savoie,  j'oublie ce qui m'entoure.

     

    Tu es trop riche Tchig, beaucoup trop riche. Cole comment peux-tu vivre à la fois en Savoie dans un hameau sans confort et dans un appartement avenue Foch ?

     

    Cole pourquoi à chaque nouvelle lettre tu as un nom de plus ?

    Pourquoi Welch maintenant ?

     

    Tchig pourquoi tu lui as menti ? Pourquoi lui as-tu dit être mon mari ? Si tu lui mens, sur quoi m'as-tu mentis aussi ? Qu'est-ce que tu attends de moi. On croit toujours que les accidents n'arrivent qu'aux autres, qu'on est plus intelligent que ces bêtas qui tombent dans les arnaques. Tchig j'ai peur. Tu attends quoi de moi ? Tchig je ne veux pas me retrouver en prison, je ne veux rien savoir de tes affaires, je ne veux pas savoir comment tu as eu tout cet argent. Tchig tu me fais peur.

     

    Cole je ne vais jamais parvenir à être à l'aise dans cet appartement.

    Qu'est-ce que tu attends de moi ?

    Cole ne me fait pas mal, s'il te plait.

     

     

    Le 21.

     

    J'ai passé une mauvaise nuit. A tous les instants j'étais aux aguets. J'ai l'impression que tu me fais passer un test. Pour prendre une douche je me suis enfermée à clé dans la salle de bain et la chambre était elle aussi fermée à clé. J'ai peur de te voir arriver, pire de voir un inconnu entré.

     

    Et à la fois, c'est ça la folie, une partie de moi voudrait que tu sois là.

     

    Plus le temps passe, plus je songe que tu ne m'as pas ouvert ton appartement par gentillesse, mais pour une raison bien particulière. Ce matin j'ai donc regardé tout autour de moi, j'ai fait un tour d'inspection très lentement, sans rien toucher. Je suis même entrée dans ton bureau suite à ta chambre. J'étais à la recherche d'un indice, d'un je ne sais quoi qui m'aurait fait dire " voilà il m'a fait monter à Paris pour ça". Mais rien.

    Cole pourquoi voulais-tu que je vois cet appartement ?

     

     

    On ne va pas chez les gens mes mains vides, aussi j'avais dans mes valises des petits riens à partager avec Mr Welch si il avait été là, que tu aurais trouvé plus tard, si il ne l'avait pas été.

     

    Quand je compare mes cadeaux à tes  paniers, j'en ai presque honte.

     

    Je me dis que tu as les moyens,  que tu es un homme délicat, que comme me l'a dit ta concierge, tu veux que mon passage à Paris soit réussi, mais trop c'est trop. Tu vois, j'aurai bien plus apprécié une rose sur un panier que ce magnifique bouquet, une boite de sardines au fond d'un placard que les trois terrines achetés chez un traiteur.

     

    Qu'est-ce que tu attends de moi ? Je ne me sens pas à la hauteur.

     

    Qui es-tu ?

     

    Il y a un tel décalage entre les costumes de ton armoire et le jeans que tu portais en Savoie. Je t'aimais mieux pauvre.

     

     

     

    Le 23.

     

    J'ai choisi la chambre la plus proche de l'entrée.

    J'ai préféré celle au lit à baldaquin sans rideau. Les poteaux du lit sont magnifiques, je ne sais pas dans quel bois ils ont été tournés, mais ils sont magnifiques. Comme elle donne sur ton bureau je l'ai supposée tienne. Pour m'en assurer j'ai ouvert l'armoire. Je ne sais plus si je t'ai déjà dit, mais je couds tous mes vêtements. Je connais donc très bien les matières. Je n'ai rien sorti de l'armoire, j'ai juste touché les tissus. Les matières sont de très grandes qualités, tes costumes valent une fortune. Et ton manteau !!! Quelle merveille ce tombé !

     

    Qui es-tu Cole ? Tu gagnes ta vie comment ? D'où te vient tout cet argent ?

     

    Je ne suis toujours pas à l'aise chez toi, je vis entre "ma" chambre, sa salle de bain et la cuisine.

     

    Aujourd'hui j'ai passé une assez bonne journée car je suis entrée dans trois grands magasins de tissus. Pour moi j'ai fait des folies, mais pour toi ... Enfin c'est le SDF heureux d'avoir acheté une table chez Ikéa et qui le dit à un type qui n'a que du Roche Bobois chez lui.

     

    Chez toi je ne me sens pas à ma place, dans les rues ça va mieux mais Paris ne me plait pas. Il y a beaucoup de richesses sur les murs, dans des vitrines mais l'air est polluée et surtout les gens sont pauvres. A Châteauneuf comme à Quimper les extrêmes ne sont pas aussi visibles.

     

    J'ai posté les cartes de Maxime. Je m'étais promis de ne pas le faire, mais suite à la conversation avec Madame Fioux ta concierge, je l'ai fait. En remontant de chez elle, j'ai regardé la salle à manger, sa table aux 24 chaises. 24 ! Je me suis amusée à imaginer notre repas de mariage, toi à un bout et moi à l'autre, d'un côté tes invités et de l'autre les miens. J'avais donc 11 invités à trouver. Stoyan, Jérémy, Madame Tillyou, Maxime. Il me reste des chaises vides. Je n'ai pas hésité à placer Maxime preuve qu'elle est toujours importante pour moi. Aussi même si je ne suis pas d'accord avec elle, j'ai fait ce qu'elle voulait, j'ai posté ses cartes postales.

     

    Pourquoi suis-je allée chez Madame Fioux ?

    Les paniers, à qui sont-ils ? A elle ou à toi ? Au début je les avais mis dans le couloir, à l'entrée. Je ne savais pas si elle avait les clés, si elle faisait le ménager en ton absence. Donc j'ai mis les paniers bien en évidence pour qu'elle les reprenne, mais elle n'a jamais du entrer car ils n'ont pas bougé.

     

    Tu lui as fait acheter trop de charcuterie et surtout trop de fromages. Ce midi en sortant je suis descendue lui rendre ses paniers et j'en ai profité pour libérer ton réfrigérateur d'une terrine, des abricots et de trois fromages. Elle a été gênée. Je lui ai bien précisé pourtant qu'il ne fallait y voir aucune générosité, je voulais juste qu'ils ne finissent pas à la poubelle. Elle a été gênée. Gêner par 400g de fromage, 1 kilo d'abricots et une barquette de 250g de pâté. Cela m'a fait sourire. Je la comprends tellement. Si une personne peut être gênée pour si peu, comprends comme je le suis pour les clés, les paniers, les fleurs, et les 250m² grand luxe.

     

    Sache que tu peux lui offrir une belle prime à Noël, elle est vraiment LA concierge parfaite, jamais elle ne dira de mal de toi, mais c'est flagrant, elle te craint. Elle ne l'a pas dit, moi oui. Comprends, je n'ai pas dit "j'ai peur de lui" mais "il vous fait peur". Dans son regard j'ai compris que j'avais vu juste. Elle a répondu que tu étais, enfin "votre mari" est un homme très discret, secret, il n'est en rien comme Mr Welch, lui il s'arrêtait dans le couloir pour discuter, il avait toujours une blague. Ce monsieur Welch ne parlait qu'anglais mais il savait  demander des nouvelles des enfants, de sa soeur, du quartier. Mr Welch Tchigrenkov maitrise très bien la langue français, a-t-elle ajouté, il est très poli mais il est discret, il ne pose aucune question, il ne parle que pour des choses précises.

     

    Je ne sais pas pourquoi, mais après l'avoir saluée, remerciée, sur le bas de sa porte, je me suis retournée et en une tirade, j'ai ajouté la métaphore suivante. Je lui ai affirmé que tu n'étais qu'un tsar de glace. 

     

    Si j'avais été une cousine, la vendeuse de légumes elle aurait confirmé mais face à moi, ta femme... " Votre mari est d'une apparence assez froide en effet" a-t-elle réussi à lâcher.

     

    L'an passé, quand Maxime m'avait arrachée à toi en me tirant par le bras, que je m'étais détournée pour te voir encore alors que j'avançais, elle avait articulé "Ce mec me glace les os". Je l'ai répété à ta concierge, oui je lui ai raconté sans détail,  que la première fois que ma meilleure amie t'avait vu elle m'avait dit que tu lui glaçais les os.

     

    Madame Fioux devait se demander si je voulais la tester ou si j'étais franche. En début elle n'a rien dit, et puis, elle s'est comme détendue, elle m'a sourie et a avoué  qu'elle  avait été  désorientée. Son mot fut "désorientée", quand je te dis qu'elle est la concierge parfaite ! Donc elle a été désorientée  de passer d'un monsieur  Welch sachant dépasser la limite de l'exubérance, à toi monsieur mon mari qui continus ton chemin sans une attention, un regard, un sourire.

     

    Alors, je l'ai interrogée. Lui arrivait-il parfois d'être triste ou déprimée, d'avoir envie, besoin de se blottir sous une couette sur le canapé, face à un bon film avec une glace vanille ou à la pistache voir au chocolat? Une glace c'est très froid lui ai-je fait remarquer, le froid peut brûler, mais derrière cette apparence fumeuse dangereuse, il n'existe sur terre aucune création plus délicieuse, plus réconfortante et qui  sache mieux inspirer les envies d'encore.

     

    " Monsieur Tchigrenkov est un tsar de glace à la vanille, madame Fioux, songez à cela la prochaine fois que vous le verrez monter l'escalier dans son manteau à la coupe impeccable".

     

    Tu dois remuer la tête en songeant "quelle petite sotte". Penses de moi ce que tu veux, si je ne te retranscris ce qui me vint sans réfléchir c'est que vous êtes condamnés à vous revoir, aussi  je ne veux pas que votre relationnel soit décalé à cause de moi.

     

    J'ajoute :

    Elle me croit ta femme, je n'ai jamais démenti.

     

     

    Pourquoi te vouloir une femme que tu n'as pas et surtout pourquoi me choisir moi ?

     

    Le 24.

     

    J'ai tout bien rangé, nettoyé, j'ai même passé l'aspirateur. Même dans les pièce où je n'ai pas vécu. Il n'y a que ton bureau dans lequel je n'ai pas osé pénétrer.

     

    Tu trouveras sur le plan de travail de la cuisine la bouteille de champagne ainsi que la bouteille de vin blanc, je n'ai pas eu envie de les déboucher et je ne savais vraiment pas où les ranger.

     

    Merci pour ta proposition de valise, mais mes tissus et mes livres entrent dans mes sacs et valises.

     

     

    Colerige Alesh j'ai vraiment besoin que tu répondes aux questions suivantes:

    Pourquoi avoir dit que nous étions mariés ?

    Pourquoi avoir transformé la boite de sardines et le kilo de riz entamé par 300€ de fruits et compagnie ?

    Pourquoi es-tu dans un chalet sans eau ni électricité alors que tu disposes d'un appartement avenue Foch ?

    Qui est le propriétaire de cet appartement ?

    Pourquoi tu signes depuis le début C.A.T non C.A.W.T ? Autrement dit pourquoi Welch ?

    Pourquoi voulais-tu que je vois cet appartement ?

    Qu'attends tu de moi ?

    Je t'en supplie, aide moi à comprendre.

     

    Je vais maintenant rejoindre la gare Montparnasse. J'ai déjà repéré une poste pour y timbrer cette lettre.

     

     

    Merci pour ce séjour très très déroutant. A l'heure qu'il est je ne sais que deux choses : Si j'avais regardé sur mappy je n'aurai jamais pris le train et pourtant je vais garder les clés comme tu me l'as conseillé. Pourquoi je n'en sais rien.

     

    Colerige, s'il te plait, ne me fait pas mal.

     

     

    Mickaelle.

     


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  • 49

    Samedi 18 juillet 15 - 21h22

     

     

    J'en tremble, j'en tremble d'émotion Cole.

    Pourquoi tu as fait ça Colerige ?

     

    Il y a un tel décalage entre ta générosité, ta confiance et le mépris, l'indifférence de Maxime. Non je n'ai pas annulé mon billet de train. J'ai voulu le faire dix fois mais dix fois la colère gagnait. La colère contre Maxime. Je ne la comprends plus.

     

    Ce matin elle est passée en coup de vent à l'agence où elle savait me trouver. Elle m'a donnée deux cartes postales écrites et timbrées que je dois poster pour elle à Paris. Pourquoi envoyer une carte de Paris à ses enfants alors qu'elle sera chez son père ? Je lui ai posé la question. Déjà je trouvais nulle qu'elle se serve de moi, mais sa réponse...  Sa réponse ! Jamais encore elle ne m'avait donnée un coup de poignard dans le coeur, et bien là c'est fait. Elle m'a dit " Bien sûr que tu ne peux pas comprendre. Tu as la chance de ne pas avoir de famille toi" . C'est de la chance ? C'est de la chance d'avoir tué son frère ? C'est de la chance d'avoir des parents qui ont payé une cantinière pour s'assurer que leur fille reste loin d'eux ? C'est de la chance d'avoir eu un mari qui ... Peu importe.

     

    Avant j'étais son amie, sa confidente, et maintenant je suis trop conne pour comprendre. Du temps où elle avait un amant, jamais elle ne m'a utilisée comme alibis ou pire, jamais elle ne m'a demandée mon appartement pour ses prouesses sexuelles. J'étais son amie. Et elle ne me disait pas que sous prétexte que je ne couchais avec aucun homme, j'étais trop conne pour comprendre une femme qui avait un amant en plus d'un mari. Depuis que sa mère est morte je ne reconnais plus Maxime. On était si proche toutes les deux. Si proche.

     

    Bref voir notre amitié prendre l'eau de toute part me désole profondément, et c'est pour ça que je n'arrivais pas à abandonner mon billet de train. J'avais envie de fuir à Paris pour ne pas voir que tout s'écroule, pour paraitre forte.

     

    Et comme si la journée n'avait pas été assez chargée en émotion,  voilà Mr  grand seigneur qui m'offre la clé de sa garçonnière.

     

    J'en tremble, j'en tremble d'émotion Cole.

    Pourquoi tu as fait ça Colerige Alesh ? Pourquoi tu as fait ça ? Cole ?

     

    Je ne devrais pas te l'écrire tu vas encore te moquer de moi mais je le dis quand même : j'en tremble d'émotion, ça me touche bien plus que tu ne pourras jamais l'imaginer.

     

    Mais Mr Welch il va en penser quoi de ton initiative ? C'est chez lui aussi. Je suis en train de perdre ma meilleur amie, je ne veux surtout pas être celle à cause de qui tu perds une personne importante. Je m'en voudrai trop.

     

    Oh Cole tu me mets dans une situation. T'es un ange, t'es un ange, oh purée !!! Oh je ne maitrise rien là. Oh tu es dingue comme mec ! Un tueur de tchétchènes hyper dangereux. Tu as tabassé un gosse !!! Alors là tu m'as tué oui. 

     

    Cole mais je ne mérite pas un truc pareil.

     

    Alors ça je ne m'y attendais pas.

    Je viendrai de gagner un million au loto je n'en serais pas plus chamboulée.

     

     

    Oui je vais aller à Paris parce que jamais quelqu'un ne m'a fait autant confiance et que si j'arrivai à faire autant confiance à quelqu'un, je serais trop peinée si il n'en usait pas. Je vais aller dans ton antre mais sache que je ne m'en sens pas digue du tout.

     

    Pourquoi as-tu fait ça  Colerige Alesh ?

     

    Oh ! Purée comment je vais arriver à te faire descendre de ton piédestal si tu me fais des plans pareil ?

    Oh purée !!!!

     

    Pourquoi as-tu fais ça ? Pourquoi as-tu fais ça ?

     

    Tu vois si tu m'avais écrit que le hasard tu faisais être sur Paris la semaine prochaine et que pour m'éviter des frais d'hôtel, je pourrais venir dormir sur ton canapé. On se connait un peu maintenant. Cette proposition je l'aurai comprise, mais que tu me confis les clés de chez toi afin que j'y aille en ton absence, c'est vraiment gênant. Et ton colocataire Mr Welch, vraiment tu me places dans une situation difficile. Ta confiance est démesurée.

     

    Il le sait Welch que tu es un ange ? Franchement je gérais mieux quand tu étais le tsar de glace.

     

    Oh Cole ................

    Pour être un tueur tu es un tueur, il n'y a pas de doute. Mais pas un tueur dans le sens que les beaufortains me l'ont raconté. Ce n'est pas du sang que tu as sur les mains, c'est le cœur que tu as sur la main.

     

    Merci Grand Monsieur Colerige Aleshandrovich Tchigrenkov.

     

     

    Mickaelle.

     


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  • 48

    Belle Sirène,

     

    Ne vis pas ta vie en fonction de l'inconstance d'autrui, garde toujours ton cap, vas à Paris acheter tes livres.

     

    Dans la boite ci-joint je te mets les clés et l'adresse du pied à terre d'où je t'écrivais quand j'y étais. Si tu en as besoin, utilises la grosse valise à roulettes qui s'y trouve. Ce n'est pas grave si elle reste chez toi ensuite plusieurs mois.

     

    Ne me renvois pas les clés tes vacances finis, c'est ton trousseau, j'ai le mien. En mars 2016 pour réaliser ton rêve, pour pouvoir aller visiter le salon du livre de Paris tu en auras encore besoin.

     

    Ne t'encombre de rien, à l'appartement il y a tout ce doit tu peux avoir besoin : couvertures, draps, serviettes de bain. Il y a même de quoi te nourrir le premier soir : du riz, des nouilles, des sardines à l'huile.

     

    Cependant une fois sur place, n'y fantasme pas, je  ne viendrai pas te rejoindre dans ton lit. Ils en pensent quoi tes poissons quand ils te voient te désinhiber plus vite qu'ils ne perdent leurs écailles ?

     

    Bonnes vacances Sirène.

    CAT

     

     

    PS :

    On est le 15, j'espère que tu n'as pas annulé ton billet de train. Je n'ai pas pu faire plus vite, je ne suis rentré au hameau que lundi et hier c'était le 14 juillet, un jour mort pour copier des clés ou poster un colis.

     

    La grande clé est celle de la porte de l'appartement. Il se situe au dernier étage. Que tu prennes l'escalier ou l'ascenseur c'est la première porte à droite.

     

    La petite clé c'est pour le code d'entrée. Il change tous les mois je ne le connais pas, aussi, tu utiles la clé. Regarde l'interphone, trouve la ligne Welch-Tchigrenkov. Au côté tu verras une fente. Quand tu auras inséré la clé jusqu'au fond, tu entendras un déclic dans la porte d'entrée.

     


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